A quand la propulsion anaérobie pour les sous-marins russes ?
Alors que le chantier naval de l'Amirauté continue la construction du lot de 6 sous-marins classiques de type Kilo (Projet 0636.3) pour la flotte de la mer Noire, la construction de la seconde unité du Projet 677 (type Lada) se poursuit avec une question en filigrane : quelle propulsion pour équiper les unités de ce projet ?
Tandis que le B-261 Novorossisk (Projet 0636.3) a été officiellement affecté à la flotte de la mer Noire en septembre dernier et devrait rejoindre la base navale de Novorossisk courant 2015, la seconde unité, le B-237 Rostov-sur-le-Don devrait être remise à la marine russe demain. Toutefois, comme l'a laissé entendre Andreï Baranov, le directeur adjoint du bureau d'étude Rubin, concepteur du type Kilo, il se pourrait bien que les 6 submersibles du Projet 0636.3 commandés pour la flotte de la mer Noire soient les derniers construits pour les forces navales russes. Rubin souhaite en effet, après 2016, mettre en avant son autre projet de sous-marin classique, le type Lada (Projet 677), dont la première unité, le B-585 Saint-Pétersbourg, a été admise au service expérimental au sein de la flotte du Nord depuis le mois d'avril 2010, après près de 13 ans de construction et d'essais. Le B-585 est actuellement basé à Polyarny au sein de la flottille de la péninsule de Kola où il mène une série d'essais et de missions visant à prouver ses capacités opérationnelles.
L'AIP de Rubin
Rubin a cependant d'autres ambitions pour les unités du Projet 677 en cours de construction et celles à venir. Ces submersibles de quatrième génération doivent être équipés de nouveaux systèmes de propulsion - à l'exception du B-585 qui dispose d'une propulsion diesel classique - reposant sur des batteries lithium-ion et anaérobies. Et justement, le 26 décembre dernier, Rubin a annoncé avoir achevé avec succès un cycle complet d'essais pour des batteries lithium-ion qui pourraient équiper la seconde unité, le B-586 Cronstadt, en cours de construction au chantier naval de l'Amirauté (Saint-Pétersbourg). Le même jour, le directeur général de Rubin, Igor Vilnit, a annoncé que le prototype de moteur anaérobie développé par le bureau était au point, et qu'il pourrait même équiper les prochaines unités du Projet 677 à compter de 2015, soit non seulement le B-586, mais également le B-587 Sébastopol.
Même si ces déclarations paraissent (très) optimistes, il n'en demeure pas moins que Rubin travaille depuis plusieurs années à la mise au point d'une propulsion anaérobie qui repose sur une technologie, le 'réformateur', développée par le concepteur. Le 'réformateur' utilise du diesel pour produire de l'électricité qui est ensuite stockée dans les batteries lithium-ion, ce qui confère au submersible la capacité de rester immergé longtemps à des profondeurs importantes, un peu comme les sous-marins nucléaires. La signature acoustique des submersibles disposants d'un AIP est toutefois bien moins importantes étant donné qu'ils ne sont ni équipés de turbines à gaz, ni d'un système de refroidissement, qui génèrent des sons susceptibles de trahir la position du bâtiment. A la différence des AIP développés notamment par le suédois Kockum (et équipant les Soryu japonais), la technologie de Rubin ne repose pas sur l'hydrogène, ce qui présente des avantages indéniables en terme de sécurité (le risque d'incendie reste très élevé avec les technologies reposant sur l'hydrogène) et d'infrastructures (il faut des équipements spéciaux pour recharger l'hydrogène à bord du sous-marin et une formation et une discipline poussée des opérateurs, alors que tous les ports sont équipés d'installation pour livrer du diesel). Rubin teste cette technologie depuis fin 2012/début 2013 sur le B-90 Sarov (Projet 20120), et manifestement, les essais se sont avérés concluants. Alors, les B-586 et B-587 seront-ils équipés d'un AIP ?
Vers des Projet 677 équipés en AIP
Compte tenu des délais de construction, il n'y pratiquement aucune chance que le B-586 Cronstadt soit équipé d'un AIP dans la mesure où la mise à l'eau du submersible est envisagée pour 2015. Quant au B-587, sa mise en service reste optimistement prévue pour 2017, ce qui rend aussi l'installation d'un AIP peu probable. Les deux submersibles devraient néanmoins recevoir des batteries lithium-ion (ce qui leur donnera une autonomie substantielle), tandis que le système AIP de Rubin pourrait être installé sur le quatrième Lada (toujours pas en chantier) et sur les éventuelles unités suivantes, toutes également équipées en batteries lithium-ion. En revanche, il ne faut pas écarter la possibilité qu'à terme, Rubin retrofit l'AIP sur les B-586 et B-587. Cette expérience, si elle s'avère concluante, pourrait même être prolongée sur les Kilo actuellement en construction pour la flotte de la mer Noire.
En résumé, si les SSK de quatrième génération du Projet 677 devraient bien être équipés d'un AIP et de batteries lithium-ion, il faudra probablement attendre 2020 pour voir une unité sortir des cales du chantier de l'Amirauté. A ce titre, la fin de la construction du lot des 6 sous-marins de type Kilo pour la flotte de la mer Noire, encore envisagée pour 2016, devrait libérer de précieuses capacités qui manquent au chantier pétersbourgeois.
Sources : Flotprom; RIA Novosti; Military-industry; Soumarsov; Forums.